LES BUNKERS

Dire non pour mieux dire oui grâce au principe de Pareto

1886, Italie. Un homme âgé de 38 ans, atteint de calvitie avancée et portant fièrement la barbe, compte les pois dans son jardin. Il se frotte le front, incrédule. Vois-tu, M. Vilfredo a passé la journée à compter et inventorier combien de pois se trouvaient dans chaque cosse. J’en conviens, c’est une drôle de façon d’investir son temps, mais fais-moi confiance il avait ses raisons.

L’italien venait de découvrir que 80 % des terres de sa région appartenaient à seulement 20 % de la population. Il voulait savoir si ce principe s’appliquait à autre chose que la concentration de la richesse. C’est pour cette raison qu’il était aussi incrédule! Même ses cosses de pois suivaient cette règle! 

Aussi révolutionnaire que fût sa découverte, notre barbu est mort en ignorant qu’il allait devenir célèbre. Il fallut attendre en 1941 pour que Joseph M. Juran popularise la loi du 80/20 et la baptise en l’honneur de son créateur: Vilfredo Pareto.

Tu ne pensais probablement pas qu’un Italien bedonnant aurait pu affecter ta productivité, mais le principe de Pareto est un des concepts les plus importants à maîtriser pour doubler ta valeur. 80 % de tes résultats sont générés par 20 % de tes efforts.

Prenons l’acquisition de compétences en exemple. 80 % des bénéfices générés par l’apprentissage d’un champ d’études sont obtenus très rapidement lors de la lecture des premiers ouvrages (20 % d’efforts). Ou encore, parlons des notes à l’université! 80 % des résultats (note de passage) sont générés par quelques heures d’étude alors qu’on sait tous à quel point il faut être intense pour avoir 100 % (sans vraiment connaître de bénéfices supplémentaires à part une tape dans le dos). 

C’est important de parler du principe de Pareto parce qu’il nous permet d’explorer un autre concept — l’aire d’impact. 

L’aire d’impact représente le 20 % qui génère 80 % des résultats. Il s’agit des tâches ou des activités qui permettent d’être le plus productif. L’idée est donc d’augmenter le temps qu’on passe quotidiennement dans notre aire d’impact. 

Trouver son aire d’impact est simple, il ne suffit que de répondre à la question: qu’est-ce que je fais qui a le plus grand impact sur _________. 

Chaque sphère de notre vie possède une aire d’impact, qu’il s’agisse de notre bonheur personnel, notre vie de couple, nos relations avec nos amis, notre vie familiale ou encore notre sentiment d’accomplissement. 

Il faut te demander, pour chacune de ces sphères, quelles sont les quelques actions qui génèrent le plus de résultats? La réponse va t’aider à connaître les choses qui siphonnent ton temps sans vraiment t’apporter de bénéfices. 

Par exemple, un bon souper entre amis peut t’apporter beaucoup de satisfaction alors que le fait d’être très actif sur les médias sociaux n’est sans doute pas aussi efficace.

Pour revenir dans un cadre professionnel, tes courriels, meetings et discussions avec collègues entrent tous dans le 80 % à l’extérieur de ton aire d’impact. Et passer la journée dans son aire d’impact représente la différence entre être occupé et être productif. 

Dire non

La principale utilité de connaître ton aire d’impact est que ça va t’aider à dire NON aux choses qui n’en font pas partie. Le temps est notre ressource la plus importante, alors chaque fois que quelqu’un nous demande quelque chose et qu’on lui dit oui, on accepte de lui donner une partie de cette ressource qui est très limitée. 

Bien vite, on dit oui à trop de choses et on manque de ressource pour respecter nos engagements. Certains engagements se font négliger, d’autres complètement oublier. Résultat? On déçoit les gens qui comptent sur nous. Ils vont donc nous juger (avec raison) comme irresponsable et incompétent. Tout ça pour avoir voulu être gentil et éviter un conflit. 

On dit oui parce qu’on veut s’attirer les faveurs du boss ou encore se faire aimer par ses collègues. Mais la réalité est que plus tu avances dans la vie, plus tu dois dire non.

Lorsqu’un cadre voit que tu es capable de mettre une limite et de dire non aux tâches non nécessaires qui sortent de ton aire d’impact, il ne va pas être fâché. Au contraire, il va comprendre et son respect envers toi en sera bonifié. Lui aussi doit dire non, même quand c’est difficile. Il dit non à son patron, ses investisseurs, ses partenaires d’affaires, ses fournisseurs de services… Tout le monde essaie tout le temps d’en avoir un peu plus. On veut être gentil, faire plaisir à tout le monde et éviter les conflits…

Mais si on ne dit pas non, on priorise l’agenda des autres au détriment du nôtre. En affaires, cette erreur est fatale. 

Chaque fois qu’on dit “oui” à quelque chose, ça dilue tous les autres “oui” qu’on a déjà donnés. Au contraire, chaque fois qu’on dit “non”, ça préserve l’intégrité des engagements qu’on a déjà pris. 

Derek Sivers propose la solution suivante: dire non ou fuck oui! Aucun intermédiaire accepté. 

On a tous déjà dit oui à un peu n’importe quoi, parfois à cause d’un ami ou d’un membre de la famille qui a insisté un peu trop, d’autres fois pour faire plaisir à un collègue ou un patron. 

La prochaine fois qu’on te demandera de prendre un engagement, rappelle-toi que ta réponse par défaut doit être “non”. Le seul cas où la réponse doit être oui est lorsque tu sais au plus profond de toi même que ça rentre dans ton aire d’impact. À quoi tu réponds “Fuck oui men, GO!” 

Ça paraît un brin intense, mais chaque “non” te permet de défendre l’intégrité de tes “oui”. Et si tu écoutes M. Sivers, alors tu vas passer la majorité de ton temps dans ton aire d’impact à triper ta vie!

Tu n’es pas un titre, tu es une oeuvre.

Je mets souvent l’emphase sur l’importance de compléter des projets. La raison pour laquelle j’insiste autant sur cet aspect est simple: aux yeux du marché, tu n’es pas un titre. 

Te décrire comme adjoint administratif, chargé de compte, rédacteur, gestionnaire de médias sociaux… Te décrire avec un titre est une erreur, même si tu as travaillé fort pour le recevoir (et que tu en es fier)! 
Le marché ne s’intéresse pas à ton orgueil ni à ton égo, ton sens d’identité ou bien encore tes valeurs morales. La seule chose qui l’intéresse est ta capacité à réduire les dépenses ou augmenter les revenus.
Bâtir un portfolio, une narrative de projets qui s’enfilent les uns avec les autres pour créer un tout plus grand que la somme de ses parties, ÇA, c’est pertinent. Considère l’image suivante tirée de “Essentialism”. 

Tu peux décider d’investir ton temps à gauche et à droite dans des projets que tu juges importants, mais s’ils ne contribuent pas à ta vision d’où tu veux être dans 5, 10 ou 15 ans, alors tu vas rester où tu es dans le moment, et ce, toute ta vie. 

Le marché ne s’intéresse pas à ton titre, il s’intéresse à ton oeuvre. 

En français, le mot “oeuvre” comporte une connotation artistique forte. Je l’utilise ici plutôt sous sa définition “somme de ton travail”. En anglais, on utilise l’expression “body of work” pour décrire l’ensemble de ce que tu crées et publies dans la sphère publique. 

Chaque projet que tu complètes peut potentiellement s’ajouter à ton oeuvre. Comme n’importe quel artiste, tu as besoin d’un portfolio pour répertorier et inventorier tes projets accomplis. Il peut s’agir d’un site web, d’une chaîne YouTube ou d’une série d’articles sur LinkedIn. L’important, c’est qu’ils soient répertoriés et faciles à partager. 

Donc, non seulement il faut dire fuck oui aux projets qu’on accepte, mais il faut également s’assurer que chaque projet: 1) s’appuie sur le levier des projets passés et 2) nous permet d’avancer un peu plus dans la même direction (comme dans notre image). 

Lorsque j’ai pris mon premier contrat Facebook pour Québec en Forme, jamais je n’aurais cru que ça m'amènerait à gérer les médias sociaux pour l’agence de voyages la plus importante du Québec. Et quand j’ai accepté ce poste, j’ignorais que ça allait m’amener à lancer une formation sur la publicité Facebook. Et lorsque je l’ai fait, loin de moi l’idée d’engager des employés et lancer une compagnie de formation en ligne. 

J’ai simplement été stratégique dans mon attribution de “oui”. Je me suis posé les questions suivantes: “Est-ce que ce projet va me faire partir à la case départ ou est-ce qu’il s’appuie sur les actifs que je possède déjà? Est-ce que ce projet va me faire avancer vers quelque chose de nouveau ou est-ce que je fais du surplace?” 

La première question est facile à répondre, tu n’as qu’à te demander si cette opportunité s’est présentée à toi à cause de tes expériences passées. Est-ce que n’importe qui peut la saisir de la même façon que toi? Si oui, alors ça veut dire que ton passé et tes actifs intangibles ne seront pas utilisés comme levier. Il faut dire non, même si on veut dire oui. 

La deuxième question est également très facile. Est-ce que ce projet va te permettre de “monter de niveau” ou “d’évoluer”? On commence petit et on grossit un projet à la fois. Pour chaque site web que j’ai créé, j’ajoutais un élément complètement nouveau qui me forçait à me développer et apprendre, soit un des quatre éléments de notre formule pour augmenter notre valeur. 

Si tu es graphiste et que tu fais des cartes d’affaires depuis les cinq dernières années, alors un autre maudit projet de cartes ne va pas t’aider à générer plus de valeur.

Chaque projet que tu acceptes doit te pousser à apprendre. Autrement, c’est une perte de temps.

Même si ça paye les comptes.

Tu as aimé cet article? Tu aimerais être informé des futures publications? Abonne-toi par courriel!

Sur le blogue